LA LETTRE DU GOSHIN BUDOKAI N°44 avril 2021
SPORT ET SANTÉ
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Oyez !
Oyez ! braves gens : « le sport, c’est la
santé ! »
Mais
peut-être faudrait-il crier plus fort pour être entendu et fournir
quelques explications pour se faire comprendre, car l'apathie, le
manque d'activité physique et la
santé précaire qui s'ensuit affectent
d'immenses cohortes sourdes à ce message.
Dans
un monde où chacun détient sa vérité et campe mordicus sur ses
convictions, comment procéder pour arriver à bouger les lignes de
la nonchalance assumée ?
De nombreuses publications présentent
des évaluations comparatives de la pratique sportive dans le monde.
Comme le spectaculaire, les idoles et leurs succès parfumés de
chauvinisme captivent beaucoup plus que la banalité quotidienne, la
plupart de ces parutions concernent le classement des nations dans les
grandes compétitions internationales. L’éventuelle sportivité des
anonymes, des sans-grades, du vulgum pecus n’intéresse pas grand monde.
Les médias répondent donc au goût du public qui n’a d’yeux que pour
l’élite et les performances exceptionnelles. Ainsi, quand les athlètes
représentant la France
remportent une victoire convoitée dans un tournoi, une coupe ou un
championnat, quand le site greatestsportingnation.com classe la
France deuxième derrière les États-Unis de 2016 à 2018, quand
worldsportranking.info, qui utilise un autre algorithme, la met à la
même place en 2019, des cocoricos endiablés surgissent de toutes parts.
La
France qui talonne les États-Unis ! Vraiment ! Sans doute
compte-t-on
bon nombre de réussites de nos élites sportives qui expliquent ces
résultats, mais quelles sont les activités physiques des millions de
spectateurs fascinés par leurs exploits ? Quel est le vrai niveau
sportif de l’ensemble de la population française ? Qui est actif,
qui l’est peu, qui ne l’est pas ? Quelques études daignent se
pencher sur les habitudes sportives des masses populaires ; elles
passent souvent inaperçues, mais ce sont celles-ci qui alimenteront la
substance de cet essai.
En
dépit de méthodologies et de
résultats sensiblement différents dans les quelques documents qui
répertorient les activités physiques des populations et tentent d'en
définir les modalités de pratique, la France se positionne généralement
dans la moyenne, donc très loin des
réussites de la fine fleur sportive. Que peut-on en conclure ? Que
le sport
politique (l'image de la France à l'étranger) et le sport spectacle
disposent de moyens dont est privé le sportif lambda !
C’est vrai, et cela commence au sein de certaines associations
sportives qui
vivent un peu des cotisations de leurs adhérents, mais beaucoup plus
des subventions et du sponsoring
dont les montants reflètent assez fidèlement les résultats en
compétition, même si certaines largesses sont attribuées avec d’autres
objectifs.
Cette réalité incite de nombreux clubs à beaucoup investir dans la
recherche
d’une élite, vitrine promotionnelle idéale qui permettra d'attirer de
nouvelles recrues rêvant à leur starisation et surtout d’obtenir les
subsides convoités, les
sportifs modestes n’étant pas totalement délaissés, mais nettement
moins
bénéficiaires de la manne publique et privée. Évidemment, le processus
s’amplifie
au sein des fédérations.
Apparemment, la médiocrité sportive de la population française
révélée dans les rares publications disponibles n'affecte pas grand
monde ;
être dans la moyenne est jugé convenable. Néanmoins, la lecture
de ces travaux laisse plutôt dubitatif. D’abord,
contrairement aux médailles, coupes et titres glanés par chaque pays,
faciles à comptabiliser, presque tout
repose sur les déclarations des gens interrogés ;
la fiabilité n’est donc pas assurée. Ensuite, lister les
disciplines et compter leurs adhérents ne présente
guère de difficulté, quoique certains adhèrent plus en pensée que
physiquement, mais évaluer la qualité des
entraînements tient de la gageure.
Quelques coachs enregistrent tous les paramètres
physiologiques de leurs athlètes, mais pour le commun des mortels,
cette
collecte s’avère irréalisable et aucune étude
n’amène de renseignement sérieux.
Ainsi, de très nombreuses personnes prétendument sportives ne dépensent
pas beaucoup plus
d’énergie lors de leurs exercices physiques qu’en s'excitant devant la
retransmission télévisuelle d'un match important.
STATISTIQUES
De
façon empirique, par croisement des différentes
données disponibles ou grâce à des études scientifiques, le lien
entre l’activité sportive et la
santé s'avère solidement établi, mais ce
simple énoncé
est insuffisant pour inciter et guider correctement le public
indolent qui ne dispose ni de l'expertise voulue ni d'une véritable
envie de bouger. En conséquence, les tentatives d'initiation
ou de reprise
sportive qui avortent sont infiniment plus fréquentes que celles qui
perdurent. En cause, une motivation superficielle, des choix d'activité
hasardeux et des entraînements
inadaptés ou sporadiques. À l’évidence, outre l'indispensable
adéquation entre les
dispositions physiques et mentales de la personne et le sport
sélectionné, la teneur de
l’entraînement, sa pertinence et son intensité, difficiles à
quantifier, sont bien les
paramètres essentiels d'une pratique pérenne et bénéfique. Alors, quel
sport conseiller aux différents publics ? Quel type
d’effort assure de réels bienfaits ? Comment motiver les
velléitaires,
orienter les égarés et secouer les allergiques au
sport ? Avant de répondre à ces
questions, essayons d'évaluer la proportion de la population française
concernée
par un déficit d'activité physique.
Une étude de l’Institut National de la
Jeunesse et de l’Éducation
Populaire publiée en 2019 dresse un tableau de la pratique sportive
en France pas très précis, mais assez édifiant. En voici quelques
chiffres qui n’ont sans doute pas beaucoup fluctué depuis (très proches
de ceux communiqués en 2003 par ce même organisme) :
- En
2018, 66% des Français de plus de 15 ans déclaraient avoir
exercé
une activité sportive au cours des douze
derniers mois, toutefois sans précision sur la discipline, ni sur sa
fréquence, ni sur sa durée, ni sur ses
conditions d’exercice. Le flou entourant cette statistique ne permet
d'en tirer qu'une conclusion : un tiers des Français adultes ou
adolescents ne pratique
aucun sport depuis au moins un an.
- En
élargissant le champ de l’étude et en y intégrant les activités à des
fins utilitaires comme les déplacements quotidiens à pied, à vélo ou
encore à trottinette, 75% prétendent être actifs. Là encore, la
subjectivité de cette affirmation ne renseigne guère sur le niveau de
pratique et ses bienfaits potentiels, mais elle souligne que 25%
des Français de plus de 15 ans sont totalement inactifs.
- Les
séances d’entraînement, toutes formes confondues (individuel ou
collectif, encadré ou informel) durent moins d’une heure pour 62%
de ces sportifs autoproclamés et moins d’une demi-heure pour 22%.
C’est peu, sachant que la tendance naturelle des personnes interrogées
est d’en rajouter.
- La
pratique sportive baisse
drastiquement avec l'avancée en âge ; seule la randonnée accueille
de plus en plus d'adeptes avec le temps qui passe, mais sans précision
sur l'âge où elle décline, la durée, la difficulté ou la périodicité.
Combien de simples
promeneurs dans le lot ?
- Seulement
12% des pratiquants réguliers (ceux qui pratiquent au moins une
fois par semaine en moyenne) déclarent s’adonner à leur sport de façon
intense. 88% des soi-disant sportifs qualifiés d'assidus ne se
donnent donc
pas la peine de forcer durant leurs entraînements. Est-ce encore du
sport ?
Au-delà des chiffres cités, dont on se
demande quelle réalité ils recouvrent, cette étude nous apprend une
chose : évaluer la pratique des activités physiques et sportives
(APS) des Français, compte tenu de la manière dont les données sont
recueillies et malgré un habillage scientifique, revêt un caractère
pifométrique affirmé. D’ailleurs un rapport parlementaire, demandé par
Édouard Philippe (alors premier ministre) en 2018 dans la perspective
d'une augmentation de la
pratique sportive, évoque 50% de non sportifs en France en
s’appuyant sur des études tout autant approximatives. Dans celui-ci,
les bienfaits théoriques du sport sont soulignés : cohésion
sociale, bien-être, santé, lutte contre la sédentarité, participation
au traitement de certaines maladies, réinsertion de publics
particuliers, productivité en entreprise, développement économique,
etc. Cependant, seul ce qui touche directement la personne peut la
sensibiliser : bien-être et santé. Ce sont donc les thèmes les
plus utilisés par les médias avec l'apparence physique.
Pour
une majorité d’individus, exercer une activité sportive en gage
de bonne santé est une rengaine
rabâchée par de multiples organismes depuis bien longtemps qu'ils se
complaisent à ânonner sans en comprendre la portée. En effet, c'est la
première motivation, malheureusement très éphémère, déclarée par les
adultes un tant soit peu actifs,
la détente, le plaisir et le jeu venant ensuite, mais plus durablement.
Les pouvoirs publics, l’Assurance Maladie et les complémentaires santé
savent que
l’exercice physique raisonné et régulier induit une réduction
sensible des arrêts de travail et des dépenses médicales
comparativement à l’inactivité.
Il est dans leur intérêt économique et financier d’encourager la
pratique sportive, aussi communiquent-ils souvent sur ce thème.
Pourtant, les
inactifs et les peu actifs, même s'ils ont été incités à acheter des
vêtements et des chaussures pour courir, ou à prendre un abonnement
dans une salle de sport, toutes dépenses dont l'effet est rarement
durable, représentent toujours une large proportion de la
population. Voici les chiffres de notre pifomètre personnel :
- 5% de vrais sportifs ;
- 15% de petits sportifs ;
- 30% d’illusionnistes dont les
activités sporadiques ou relâchées permettent difficilement de les
qualifier de sportifs ;
- 50% d’inactifs.
Même si tous les chiffres cités sont discutables, le manque
d’engouement général, malgré l’insistance des différentes institutions,
s’avère incontestable. Comment l’expliquer ? La formulation
« être en
bonne santé » est-elle trop floue ? Sans doute ! car des
gens,
essoufflés après avoir monté un ou deux étages, obèses ou affectés
d'une maladie chronique se disent malgré
tout en bonne santé. Quels arguments pourraient les convaincre qu'ils
sont en danger et inciteraient plus sûrement l'ensemble des personnes
léthargiques à réagir ?
Le lien entre l’activité physique et la santé est-il suffisamment
démontré ?
Une
étude parue le 14 avril 2021 dans le British Journal of Sports
Medicine pourrait peut-être en aider certains à prendre conscience
du rapport incontestable qu’entretiennent le sport et la santé. Que
nous apprend
cette publication ?
- Après
avoir étudié le cas de 48 440 patients adultes avec un diagnostic
de Covid-19 du 1er janvier au 21 octobre 2020, l’équipe de chercheurs a
pu identifier l’absence d'activité physique comme le risque majeur de
développer une forme sévère de l'infection au coronavirus
Sars-Cov2. Être inactif s'avère plus nocif que tous les facteurs
couramment cités, comme le
tabagisme, l’obésité, le diabète, l’hypertension, les maladies
cardiovasculaires et le cancer.
- En comparaison avec les personnes
ayant une activité physique régulière, dont le dynamisme moyen est
pourtant relativement faible — nous préciserons ce point plus
loin —, les patients inactifs ont un
risque nettement plus élevé d’hospitalisation (multiplié par 2), de
développer des formes graves (73% en plus) et de décès (multiplié
par 2,5).
- Par
ailleurs, les personnes victimes d'une affection chronique ont avoué
avoir
réduit leur activité physique en raison de la crise sanitaire. Cette
association de deux conditions a sensiblement
aggravé le risque de développer une forme sévère.
Voilà la seule étude à notre
connaissance qui lie l’activité sportive à la
santé sans l’intégrer dans un ensemble plus large de bons
comportements. Le lien, les chiffres parlent d’eux-mêmes, n’est plus
contestable.
Bien que ne présentant pas un réel caractère scientifique, une
publication de l’Anses, l’Agence Nationale de Sécurité Sanitaire,
enfonce le clou en titrant : 95% des Français ne font pas
assez de sport. « Quand on a démarré l’étude, on ne pensait pas
que le chiffre serait aussi élevé », explique le professeur Irène
Margaritis. Ont été évalués les risques liés aux niveaux d’activité
physique et de sédentarité des adultes susceptibles d’entraîner diabète
de type 2, obésité et accidents cardio-vasculaires. Cet avis se fonde
sur l’analyse des résultats de plusieurs études et rapports menés sur
la question (liste et méthodologie non précisées) entre 2011 et 2020.
La population incriminée a entre 18 et 65 ans, femmes enceintes et
ménopausées exclues. Pourquoi exclure ces femmes et le troisième
âge ? Tout cela manque de rigueur, mais l’apathie des Français est
indéniable.
Les hôpitaux du monde entier ont
constaté que les hospitalisations et les décès dus au Covid-19 sont
fortement corrélés à l’âge des malades ; plus on est vieux, plus
le
risque augmente, mais une corrélation n’implique pas une relation de
cause à effet. D’ailleurs, l'analyse susmentionnée des causes de
complication du
Covid-19 n’évoque pas l’âge des patients ; elle met en évidence le
lien étroit et prépondérant entre le manque d’activité physique et
l’aggravation des symptômes de la maladie. Effectivement, la vieillesse
ne doit sans
doute pas être directement incriminée, puisque même âgé, on
peut être actif, adopter de
nouvelles résolutions, changer de mode de vie ou amplifier sa
dépense énergétique. Cependant, une autre corrélation mise en évidence
dans de multiples enquêtes est
éloquente : plus l’âge avance moins on est sportif. Voici la
répartition des sportifs autoproclamés, ceux qui déclarent avoir
pratiqué un sport, même occasionnellement, durant l'année 2003, femmes
et hommes confondus
(étude Jeunesse, Sports et Vie Associative parue en 2005) :
- Entre 15 et 24 ans : 90% ;
- Entre 25 et 34 ans : 85% ;
- Entre 35 et 44 ans : 82% ;
- Entre 45 et 54 ans : 73% ;
- Entre 55 et 65 ans : 67% ;
- Au-delà de 65 ans : 37%.
La chute est régulière jusqu'à environ
60 ans, ensuite, elle devient
vertigineuse. N'oublions toutefois pas qu'il s'agit de sportifs
autoproclamés dont la pratique est souvent minimaliste. D'après les
chiffres précités, 37% des plus de 65 ans font du sport ; c'est
totalement chimérique. La réalité, comme chacun peut l'observer autour
de soi, est largement en-deçà. Si le manque
d’activité, première cause de formes graves
du Covid-19,
s’amplifie sévèrement avec la vieillesse, il semble très
logique que les personnes âgées soient plus atteintes que les autres
puisqu'elles sont de plus en plus passives,
mais pour les sceptiques qui n’arrivent pas à croire à la nocivité
prépondérante de l’inactivité, voici
une autre publication probante portant sur l’hygiène de vie, dont les
APS
représentent un volet important.
Une équipe de scientifiques de l’université de Cambridge a mené une
enquête portant sur 20 244 personnes pendant 14 ans, dont
1 987 sont décédés durant cette période, afin de déterminer
l’impact du mode de vie sur
l’espérance de vie.
- L’étude conclut que le mode de vie
idéal — absence de tabac, faible consommation d’alcool, fruits et
légumes journaliers, exercice physique d’une demi-heure chaque
jour — majore l’espérance de vie de 14 ans par rapport au cumul
des
quatre facteurs de risque.
- Le cumul des quatre facteurs
(tabac, alcool, manque de fruits et légumes et d’APS)
multiplie le risque de décès précoce par 4,4 ; trois facteurs, par
2,5 ; deux facteurs par près de 2 et 1 facteur par 1,4.
Le sport ne limite donc pas ses
bienfaits à une réduction de la
mortalité liée au Covid-19 ; toutes les maladies voient leur
létalité diminuer quand l'hygiène de vie est bien entretenue.
Une remarque s’impose : une vraie pratique sportive induit le plus
souvent le respect de deux ou des trois autres critères de l’hygiène de
vie
retenus par ces chercheurs. En revanche, l’application d’une des
recommandations, ne pas fumer, refuser l'alcool ou consommer des fruits
et légumes, n’engendre pas systématiquement l’adoption du sport. En
conclusion, le sport est bien la source essentielle
d’une vie saine, longue et heureuse.
Finalement, les résultats de ces
études apparaissent comme une plate
évidence aux yeux des sportifs qui connaissent depuis longtemps les
effets bénéfiques de leur activité. Néanmoins, elles amènent une
importante précision : l'activité physique influe sur la santé
dans des
proportions, maintenant chiffrées, que peu de gens soupçonnaient.
Encore
faut-il que les entraînements soient intelligemment
menés, car à long terme, les erreurs, surtout quand elles se répètent,
se payent parfois très cher, considération qui brille par son absence
dans ces publications et explique certaines défaillances d'athlètes
apparemment surprenantes. Quoi qu'il en soit, ces preuves
supplémentaires
et particulièrement éloquentes du lien entre sport et santé place les
entraîneurs sur un pied d'égalité avec les
médecins ; les premiers pour
la prévention des maladies, les seconds pour leur traitement. Avec,
bien sûr, des responsabilités équivalentes qui les obligent.
Les chiffres ainsi mis en exergue
devraient bouleverser les certitudes
des fatalistes, qui croient
à l’inflexibilité du destin, des besogneux, qui ont des choses plus
sérieuses à faire qu'un loisir sportif, et de ceux qui justifient leur
inactivité en évoquant des personnes en bonne santé n'ayant jamais
pratiqué de sport ou qui prétextent, cas fréquent, un hypothétique
manque de temps. En effet,
si la première publication anglaise évoquée porte uniquement sur le
Covid-19, ses conclusions sont transposables à toutes les maladies
infectieuses et, sans doute, à beaucoup d'autres affections, ce que
confirme l'étude de l'université de Cambridge qui étend l'influence de
l'hygiène de vie à toutes les pathologies. Cependant, les preuves de
la généralisation possible du lien entre sport et santé ne s'arrêtent
pas là.
- Si l'obésité
est bien une maladie, l'activité physique apparaît comme sa meilleure
prévention ; les vrais sportifs obèses sont rares.
- Le sport est aujourd'hui reconnu
comme aussi efficace que les médicaments pour traiter le diabète. Il
est évidemment préconisé en prévention de cette maladie et même dans
son traitement.
- L'Association pour la Recherche
sur le Cancer communique
actuellement sur le risque de développer un cancer :
une bonne hygiène de vie, sans excès, avec une alimentation saine et
une activité sportive régulière, réduit de 40% son occurrence.
- Constat comparable pour
l'université d'État d'Ames
dans l'Iowa, mais
pour la démence. L'analyse des données de plus de 300 000
personnes
âgées de 50 à 73 ans suivies pendant 8 ans a montré que ceux qui
respectaient tous les critères d'une vie saine, où le sport figure
encore comme une priorité, avaient un risque de démence réduit de
moitié
par rapport à ceux qui s'en abstenaient.
Cette
énumération pourrait se poursuivre indéfiniment, car la grande majorité
des maladies, tant physiques que psychiques, affecte en priorité les
gens peu actifs dont l'hygiène de vie est sensiblement dégradée.
D'ailleurs, il ne se passe pas un mois sans qu'une nouvelle publication
scientifique ajoute un nouveau bienfait à l'activité physique.
Impossible, néanmoins, de passer sous silence la multitude d'opinions
franchement hostiles au sport, les réseaux sociaux, grands dispensateurs
de la bêtise humaine, multipliant à l'infini leurs occurrences. Notons
que cette fronde ne s’appuie jamais sur des études sérieuses,
mais sur des préjugés, des assertions péremptoires et sans fondement de
personnages illustres, des on-dit, des gesticulations d’influenceurs illuminés,
des prétendues statistiques qui s’établissent sur un très petit nombre de cas,
voire sur un exemple unique, ou des reportages concernant les excès,
les dérives, les accidents et les conséquences souvent fâcheuses des
conditions d’exercice du sport de très haut niveau qui n’est en aucune
manière l’objet de notre propos. Nous évoquons ici le sport intelligemment
et raisonnablement pratiqué, même de façon intense, mais sans l’épée de Damoclès
que constitue l’obligation de résultat. L’activité physique saine est un plaisir,
pas une contrainte, ni subie ni auto-infligée.
Aussi bizarre que la formulation le
paraisse, être en bonne santé est le moyen le plus sûr de ne pas tomber
malade, or le sport, à condition qu’il soit pratiqué dans la joie et
la bonne humeur, est
toujours considéré comme un critère essentiel pour garantir un
excellent état physique, mental et sanitaire. Les esprits tatillons
opposeront les noms de sportifs gravement malades ou décédés, du
Covid-19 ou d’une autre affection. Néanmoins, quand des analyses ou une
autopsie sont pratiquées, une comorbidité ou une anomalie congénitale
sont très souvent découvertes. Certes, une statistique n’empêche pas
les particularités individuelles de se manifester ; elle démontre
néanmoins l’intérêt, voire la nécessité, de s’en inspirer même si le
risque paraît négligeable. Un pourcentage faible de mortalité
précoce en cas de persistance dans une habitude nocive, peut susciter
l’espoir de passer au travers des mailles du filet sans rien changer,
mais cette solution de facilité n’est pas judicieuse, sauf à vouloir
jouer sa vie à la roulette russe sans se préoccuper des proches ni de
la collectivité malgré le risque de leur infliger l’inconséquence d’une
croyance naïve à l’invulnérabilité. « Attendre la chance, c’est
attendre la mort », disaient les samouraïs. De plus,
indépendamment du recul probable de la date de sa mort, entretenir une
bonne hygiène de vie est la méthode la plus sûre, attestée par la
médecine, pour s’assurer une qualité de vie au-dessus de la moyenne.
En réalité chacun, dans
une très large mesure, est maître de son sort, et par répercussion de
celui de la collectivité, mais cela nécessite
de comprendre et d’adopter les comportements qui conditionnent une
vie saine et épanouie.
Parmi les règles à respecter, le sport s'avère incontournable,
sorte de prophylaxie malheureusement sous-estimée par la grande
majorité de nos concitoyens. Cependant,
comme toujours, il ne sert à rien de raisonner sur des termes mal
définis ; commençons par là.
CIRCONSCRIRE L'ACCEPTION DES MOTS « SANTÉ » ET
« SPORT »
Le Robert définit la santé ainsi :
« fonctionnement plus ou moins harmonieux de l’organisme. »
Dans cette acception, la santé peut être bonne ou mauvaise. Ce
dictionnaire donne une autre définition où la santé est toujours
sous-entendue bonne : « bon état physiologique d’un être
vivant, fonctionnement régulier et harmonieux de l’organisme. » On
retrouve cette acception dans l'expression « avoir la
santé ».
Avec ce même sous-entendu, l’OMS va plus loin : « état de
complet bien-être physique, mental et social, qui ne consiste pas
seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ». Ainsi, une
condition physique qui n’est pas optimale, un esprit confus ou stressé
suffisent pour considérer que la santé est détériorée, car ces
dégradations, même légères, constituent des entrées potentielles pour
des affections plus ou moins graves ou des polluants psychologiques.
Mais qu’entend-on par bien-être social ? Nous vivons au sein d’une
famille, de différents groupes ou de l’ensemble de la société ;
nous pouvons nous y sentir bien ou mal, accueilli ou rejeté, écouté ou
contesté, aimé ou haï… Certaines relations sont tordues, parasitées,
déséquilibrées, entachées d’indifférence, d’incompréhension ou
d’hostilité. Au même titre qu’un physique affaibli ou une psychologie
perturbée, un malaise social peut troubler les équilibres internes d’un
individu et favoriser l'apparition d'une maladie. Ce qui différencie
le bien-être social, du physique et du mental, c’est son extension à
tout
le tissu relationnel qui concoure à la qualité de vie de l'individu ou
qui la compromet. Des
personnes en bonne santé, vont devenir
agressives, entrer en dépression, détériorer leur hygiène de vie avec
tous les soucis qui peuvent en découler, voire attenter à leur vie, à
cause d’une rupture amoureuse, d’une rancœur tenace envers quelqu’un,
d’une hiérarchie professionnelle trop pesante, de la trahison d'un ami,
de l'impression d'être inutile ou mal aimé, d’une difficulté
d’intégration, d’une ostracisation, de la relégation du club qu’ils
supportent ou de la défaite de leur parti politique. Pour être en bonne
santé sociale, les rapports à autrui, aux choses et aux idées doivent
être établis et vécus sereinement et clairement. O surprise !
cela concorde avec une des principales préoccupations de l'art martial,
budo en japonais. « L’art martial est fait pour ne pas servir »
disait Gichin Funakoshi.
C’est donc la définition fournie par l’OMS que nous retenons,
puisqu’elle recèle tous les aspects d’une excellente santé, y-compris
ceux auxquels Monsieur Tout-le-Monde ne pense pas spontanément, sauf le
budoka évidemment, pour qui l'objectif prioritaire est de maintenir des
relations pacifiques ou de les rétablir quand elles se dégradent, la
technique martiale n'étant qu'un dernier recours.
Penchons-nous maintenant sur la définition du sport.
Les
différents ouvrages consultés donnent du sport des
acceptions extrêmement variées, car ce terme, apparu au cours du
19e siècle, n'a pas toujours désigné la même activité et des
interprétations différentes subsistent encore aujourd'hui. Voici celle
des
dictionnaires les plus connus, pas réellement conforme à l'usage
courant :
« Activité
physique qui s’exerce sous forme de jeu ou de compétition
suivant des règles déterminées. »
Le croquet, qui consiste à faire passer
des boules en bois à travers des arceaux en les frappant à l'aide d'un
maillet, les fléchettes et la pétanque seraient donc des sports puisque
ces
jeux d'adresse suivent des règles et font l'objet de compétitions. A
contrario, de nombreuses activités physiques très souvent pratiquées en
autonomie,
librement, hors des structures
sportives (alpinisme, spéléologie, jogging, trail, randonnée sportive,
cyclotourisme, VTT, skateboard, plongée sous-marine...) ne sont régies
par aucune règle
précise ; elles n’entrent donc pas dans cette définition et ne
devraient pas être considérées comme des sports ! Voilà qui va
faire sourire les nombreux adeptes de ces disciplines qui y laissent
des litres de sueur et une fatigue parfois à la limite de l'épuisement.
Aucune personne sensée ne leur refuse le titre
de sportif, sauf les pseudo-érudits ayant rédigé ces absurdités pour
qui une activité physique libre de contraintes réglementaires ne serait
pas un sport, mais
la même en compétition en deviendrait un. À
croire que les dictionnaires sont rédigés par des gens qui n’ont
jamais décollé leurs fesses de leur siège ; le manque de sport
leur embrume les neurones.
Les vrais arts martiaux, réalistes et
efficaces, qui in fine ne sont pas un
jeu même si on y trouve du plaisir,
excluent la compétition et n’acceptent aucune règle, ne s’inscriraient
finalement pas, eux aussi, dans le paradigme sportif ! « Le
budo est bien plus qu'un sport »,
dit-on couramment. Certes, mais il suffit de participer à un
entraînement pour en constater l'aspect très sportif, c'est-à-dire qui
demande des efforts intenses, même si des
particularités qui transcendent la simple activité sportive sont
immédiatement perceptibles. Ce sont donc les termes employés qui ne
reflètent pas la réalité. Sans doute devrions-nous proposer une
définition du
sport plus générale que celle précitée qui se réfère essentiellement
aux sports dont les règles et les épreuves plus ou moins
officielles permettent
une
médiatisation efficace : football,
rugby, basket, handball, judo, tennis, vélo, sports mécaniques,
athlétisme… Une
définition qui ne
permettrait pas au pêcheur à
la ligne, au bouliste, au joueur d'échecs, au e-sportif
figé devant son écran, au promeneur du dimanche, au parent qui
renvoie quelques balles à sa progéniture, à l'éternel retardataire qui
court après son bus, à l'amateur de baignade
estivale ou au
conducteur éméché qui fait crisser ses pneus dans les virages de
revendiquer le caractère sportif de leurs occupations, car personne,
hormis les paresseux et quelques intellectuels, ne
conçoit le sport sans de copieux efforts. Mais une
définition qui intégrerait toutes les activités physiques de loisir où
la dépense d'énergie
est substantielle en dépit d'une absence de règles ou de compétition.
Même
les prescriptions de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), souvent
citées comme base indispensable de l'exercice physique, ne
s'inscrivent guère dans la notion usuelle du sport, car elles n’exigent
que
deux heures et demie par semaine d’une activité d’endurance
d’intensité modérée (sont cités la marche, la balade à vélo,
le jardinage…) ; aucun risque de surmenage avec ces occupations qui,
bien que bénéfiques, ne sauraient se parer du qualificatif sportif.
Sans doute cette organisation a-t-elle pris conscience du faible effort
correspondant à ses recommandations puisque depuis peu de temps elle
précise qu'il s'agit d'un minimum qui a vocation à s'étoffer.
Pour bien préciser les niveaux d'effort
considérés et leurs effets, mettons en perspective quelques données.
Seulement 7% des patients de l'étude anglaise sur le Covid-19,
ceux que les chercheurs ont étiqueté « sportifs »,
respectaient ou
faisaient mieux que les recommandations de l’OMS. Quant
aux inactifs de l’étude (15%
du panel), ce sont des gens qui s’agitaient, sans doute mollement,
moins de dix minutes par
semaine et une pléthore d’individus (78%) s’inséraient
entre ceux-ci et les pseudo-sportifs labellisés OMS, donc avec une
pratique notablement insuffisante. Néanmoins, ces chiffres sont à
méditer, puisque, dans le cas de cette pandémie, par rapport à la
mortalité des inactifs, il suffit d'avoir
pratiqué
une activité physique conforme aux peu contraignantes recommandations
de l'OMS pour diviser le risque de
décès par 2,5. Quel diviseur pour les vrais sportifs ? Sans doute
nettement plus élevé,
grâce à un dynamisme qui leur confère une santé resplendissante (le
corps) et un enthousiasme sans faille (l'esprit).
À l’aune de ces différentes études, le sport relève de l'impérative
hygiène
quotidienne, mais il ne faut pas tomber dans
l’illusion en s’adonnant à un
simulacre d’activité sportive si l’on souhaite bénéficier
d’un réel apport en termes de santé, de bien-être,
d’épanouissement et de joie de vivre, car qu'importe de ne pas mourir
si c'est pour vivre
mal ?
De fait, le corps médical est
satisfait s’il empêche les patients
inactifs de mourir en leur prescrivant quelques dizaines de minutes
d’APS journalière, mais le vrai sportif ne veut pas survivre, il
demande beaucoup plus, car il sait — ce n’est pas une
croyance ; il le constate réellement — qu’un entraînement
soutenu et régulier lui procure d’immenses bienfaits. Ainsi, sa
condition physique est excellente, sa santé solide, sa technique
maîtrisée
et son corps se plie à tous ses désirs, mais surtout, il ressent un
sentiment de plénitude pendant son effort et même après. L'analyse de
cet état est complexe ; il est en partie lié à
la stimulation des sécrétions hormonales durant les efforts
prolongés
ou intenses, notamment l'endorphine, la dopamine et la sérotonine.
Ces hormones permettent la performance, bien sûr, mais
elles ont de nombreux autres effets bénéfiques :
- Sensation de plaisir, de
récompense, d’euphorie ;
- Réduction de la perception de
la douleur ;
- Stabilisation de l’humeur et
diminution de l’agressivité (sauf en compétition dans les sports
d'opposition, ou quand un enjeu important est ressenti, le stress et
l'agressivité activant la sécrétion d'hormones antagonistes) ;
- Régulation de la faim et de
l’absorption des aliments qui s'adaptent aux besoins réels ;
- Diminution du risque de
diabète de type II (environ 6% de la population) ;
- Amélioration de la mémoire.
Ce n’est pas tout ; cet état
physique, sanitaire et mental prédispose à l’ouverture, à la
découverte. Tout ou presque devient possible, puisque la vie n’est plus
bornée par des capacités limitées. Un budoka y ajoute la sérénité que
confère une bonne méthode de défense et la lucidité apportée par la
qualité de son observation libérée des habituelles perturbations
induites par les affects ; deux qualités qui en induisent beaucoup
d'autres et figurent parmi les principaux piliers de l’art
martial. Quand il est bien avancé dans la maîtrise de son art, le
budoka est habité d’une indéfectible joie de vivre.
La nuance entre vivre et survivre est de taille ; à chacun de
choisir, mais nous préférerions que tout le monde choisisse de vivre
pleinement car, nous le verrons ultérieurement, le bénéfice n'est pas
seulement individuel.
Voici
notre définition du sport :
Activité physique dynamique, soutenue et autant que possible régulière
permettant
d'acquérir, de développer ou
d'entretenir des aptitudes
athlétiques, techniques et
mentales grâce à un programme d'entraînement adapté à l'objectif visé.
Dans tous les cas, si le pratiquant n'est pas assidu, si l'entraînement
ne fait pas transpirer, si le
rythme cardiaque n'est pas sensiblement accéléré, si le souffle n'est
pas largement sollicité et s'il n'y a pas une volonté de progrès sous
quelque
forme que ce soit, le
terme
« sport » paraît usurpé. De plus, beaucoup de disciplines
sont déséquilibrées et certaines créent même des perturbations ou des
traumatismes fâcheux.
Il faut donc préciser quelles formes d’activité physique offriront de
réels bénéfices.
À LA RECHERCHE DU SPORT COMPLET
La liste des activités qui revendiquent
l'appartenance à l'univers sportif est interminable. Si nous devions
dresser la nôtre, elle serait sensiblement plus courte, mais pas
immuable, car certaines disparaissent alors que d'autres émergent de la
profusion d'idées naïvement créatrices. Nombreux sont les sports dont
l'intérêt, selon les différents points de vue envisageables, est
discutable. Très peu sont susceptibles de combler toutes les attentes,
sans déséquilibre ni lacune.
Listons donc ce qui semble idéalement nécessaire pour que
le sport fournisse tous les attraits ou les bienfaits concevables et
épargne les soucis parfois rencontrés par les sportifs :
- Solliciter
tous les aspects de l'appareil locomoteur et des systèmes
cardio-vasculaire, respiratoire et nerveux de façon
compatible avec l’état du
sportif au moment de l’exercice et mobiliser l'ensemble du corps
harmonieusement pour ne pas créer de déséquilibre préjudiciable. Si une
activité privilégie certaines parties du corps ou un système
particulier, il faut
lui associer les compléments nécessaires à l'obtention d'un équivalent
de sport complet.
- Entretenir
ou développer la force (mesurée en newton), l'énergie
(capacité à fournir un travail, exprimée en joule),
la puissance (énergie par unité de temps, en watt), la vitesse,
l'accélération, la souplesse, l'endurance,
la résistance, la réactivité, la précision, la coordination,
l'équilibre… toutes les aptitudes physiques dans le respect
des limites physiologiques
et stimuler toutes les qualités mentales : l'attention, la
perception,
l'analyse, la synthèse, la déduction, l'induction, la mémoire, la prise
de décision, la volonté, la persévérance,
la créativité, la confiance en soi, le contrôle des affects…
Renforcer l’acuité sensorielle
sera un plus non négligeable. Le développement d’une petite partie de
ces qualités au détriment des autres peut permettre de
briller quelque temps dans une activité particulière ; c'est
insuffisant, souvent nuisible, pour s’épanouir toute sa vie dans le
sport et dans tout ce qui caractérise une existence saine et bien
remplie. Le vrai sportif complet dispose de toutes les qualités qui
autorisent
l'adaptation rapide à une large panoplie de sports.
- Être
régulier, au moins deux fois par semaine — une moindre itération
ne permet pas de progresser suffisamment pour maintenir la
motivation —, durer plus d’une heure sans
interruption prolongée, avec une intensité relativement élevée pendant
une
grande partie de l’entraînement (environ 70% de la
fréquence cardiaque maximale [FC max]) et imposer quelques
accélérations cardiaques (plus de 90%
de la FC max) dont la durée peut progressivement s'allonger.
Cette FC max se calcule
approximativement selon la formule 220 moins l’âge, mais il vaut mieux
la relever lors d’un effort extrême (après s'être bien échauffé), les
variations individuelles
s'affichant dans une large fourchette. Des durées plus courtes sont
envisageables, à condition d'en augmenter la fréquence et l'intensité.
Attention toutefois à maintenir un échauffement correct.
Une bonne dose d'entraînement : trois fois
une heure et demie par semaine. En faire plus est
possible à condition de veiller à respecter un repos
suffisant et de ne pas sombrer dans le surentraînement, mais
si c’est en couplant plusieurs sports, le risque est moindre, chaque
activité sollicitant le corps, les articulations et les différents
groupes musculaires de façon particulière.
Néanmoins, des activités
sportives, notamment celles de pleine nature,
sortent du cadre de l’entraînement traditionnel. Leur durée,
parfois la journée entière, et les aléas climatiques ne permettent pas
de les gérer comme celles qui se passent dans les stades ou les
structures couvertes. En général, leurs adeptes
arrivent très bien à les pratiquer pendant les week-ends ou les
périodes de vacances et à les
articuler avec leurs autres activités, généralement plus brèves, mais
souvent plus intenses.
Prudence néanmoins en cas de fatigue générale
persistante ou de blessures à répétition ; sans doute faudra-t-il
ralentir le rythme ou modifier certains gestes. En cas de
reprise après une interruption d’activité, la
montée en intensité devra être progressive ; d'autant plus si on
démarre à très petit niveau. Il est important d'inscrire la réussite
dans son entraînement. En vouloir trop, trop vite risque de mener vers
l'accumulation d'échecs, de dégoûter,
avec l'abandon qui s'ensuit.
- Venir
en complément d’une vie active qui refuse toute sédentarité prolongée.
S’activer deux heures par semaine pour compenser une inactivité
chronique (travail ou jeu devant un écran toute la journée) n’est pas
recommandable. L’expérience nous montre que les
préconisations de l’OMS sont insuffisantes pour être qualifiées de
sportives, mais elles peuvent s’intégrer dans la partie vie active et
ainsi préparer à des activités plus soutenues.
- Choisir des disciplines qui
intègrent des aspects fondamentalement
motivants (jeu, communion avec la
nature, diversité des situations, plaisir de se sentir performant ou de
maîtriser une gestuelle, perception claire de progrès réguliers,
utilité
pratique…) permettra de les pérenniser, ce qui s'avère
indispensable. En effet, les bénéfices
escomptés ne surviendront pas tous avant de nombreux mois, voire
plusieurs
années, et devront être entretenus, car ils disparaissent très vite en
cas d'interruption de la pratique sportive. Les motivations éphémères
ou futiles
(perdre
du poids, accompagner un ami, suivre une mode…) sont d'un piètre
secours.
- Même
si les activités intellectuelles sont fréquentes dans sa vie, le sport
doit présenter de nombreuses situations où l’esprit et le corps sont
mobilisés conjointement : résolution de problèmes, élaboration de
stratégies, compréhension de la raison et de la finalité
des gestes, acquisition intuitive du fonctionnement corporel, maîtrise
de ses réactions, contrôle de ses émotions,
circonstances nécessitant une totale
disponibilité de l'esprit… En effet,
le mental est aussi important que le corps, or
psychisme et physique interagissent en permanence ; en négliger un
revient à condamner les deux à des déficiences plus ou moins
dommageables et les déconnecter va à l’encontre de l’indispensable
harmonisation des différents aspects constitutifs de l’individu. Les
philosophies de l’Extrême-Orient prescrivent depuis longtemps cette
harmonie du corps et de l'esprit, mais l’Occident commence seulement à
en comprendre la nécessité absolue pour parvenir à un total
épanouissement.
- Tout ce que nous venons d’évoquer
ne sera pas possible sans de multiples interactions, de collaboration
ou d’opposition, entre les pratiquants. D’abord ces échanges
enrichissent la pratique, mais surtout ils participent à la
compréhension d’autrui, source de l’harmonie relationnelle. L’homme est
un animal social, ce qui n’est pas synonyme d’amical ; tout ce qui
l’aide à construire une société apaisée, la santé sociale, notamment la
faculté
d’empathie, doit être favorisé. Attention toutefois à la compétition
dans les sports d’opposition individuelle ou par équipe qui suscite
souvent de l’animosité et même de l’agressivité ; cela n’est bon
pour personne et en particulier pour les jeunes qui construisent leur
personnalité. Les responsables, entraîneurs et parents, devraient
veiller à éviter cette dérive.
Évidemment, les activités physiques sans interaction, qui ne s’occupent
que de soi et sont parfois totalement narcissiques, ne répondent pas à
ce
dernier item, mais elles peuvent s'insérer judicieusement dans un
ensemble de sports complémentaires.
Ces préconisations représentent
l’optimum théorique vers lequel il faut tendre. Certaines disciplines
sont loin de satisfaire à tous ces critères ; elles ne sont pas à
rejeter systématiquement, mais il faut être conscient de leurs lacunes
ou de leurs déséquilibres et essayer de les compenser. Une solution
s'affiche parfois de façon évidente. Par exemple, la randonnée en
montagne
profite surtout au bas du corps ; en prenant des bâtons, le haut
participe à l'effort, à condition de les utiliser en transférant
effectivement une partie des appuis dans les bras et les épaules. Cela
ne répond toujours pas à toutes nos
préconisations, mais l'amélioration est sensible.
Nombreux sont ceux qui s'adonnent à
plusieurs sports. Des assemblages bien pensés peuvent s'approcher de
notre modèle, cependant, il faut prendre garde à ne pas associer des
activités qui cumulent les mêmes défauts, travers fréquent, car les
goûts et les aptitudes d'un individu le poussent toujours dans le même
sens.
Aucun sport ne peut être considéré comme
réellement complet, mais certains, peu nombreux, s’approchent de cet
idéal. Quelques
pratiques martiales, ni spécialisées ni compétitives, entrent dans ce
cénacle ultra-confidentiel. Le véritable artiste martial, serein et
lucide, est apte à répondre, de façon préventive ou active et selon des
modalités très variées, à toutes les formes d’agression, de la simple
provocation à la violence extrême, grâce à ses capacités physiques,
techniques, mentales et relationnelles dont il étudie et peaufine les
différents
aspects toute sa vie, car le budo ne présente guère d’intérêt si sa
pratique est éphémère.
Le budo authentique, dont l’utilité pratique est indéniable, constitue
donc un choix souverain puisque, sport quasiment sans lacune qui
conduit à l’harmonie du corps et de l’esprit, il s’exprime chez
l’adepte comme un art de vivre qui en décuple l’intérêt. Évidemment,
tout cela ne s’acquiert pas du jour au lendemain ; persévérance,
régularité et goût de l’effort sont requis, mais cela s’applique à tous
les sports, même si ce qu’ils amènent ne saurait, pour la plupart, se
comparer aux apports de l’art martial. Quel que soit le sport envisagé,
ces règles de conduite s’avèrent indispensables. C’est dans l’enfance
qu’elles s’imprègnent le mieux dans l’habitus, mais les acquérir
tardivement reste toujours possible.
Certaines personnes trouvent toujours des prétextes pour se dispenser
de sport ou pour éviter d’y emmener leurs enfants. Toute entorse à la
priorité absolue du sport sur les contingences, les prétendus
impératifs et autres fariboles se paiera forcément un jour. Pour
l’adulte inconstant, c’est dommageable, pour l’enfant qui subit, c’est
le priver des innombrables bienfaits du sport et compromettre sa santé.
Les médecins en témoignent et les
statistiques le prouvent : les
sportifs sont moins souvent
malades et guérissent plus vite que les inactifs. C’est normal
puisque leur bonne condition physique et les défenses immunitaires
efficientes qui en découlent, acquises lors
d’entraînements soutenus et réguliers, les préservent des différents
fléaux qui
affectent les oisifs. Le budoka
possède toutefois un sérieux avantage. Comme il
a beaucoup travaillé sur les différentes composantes de sa psychologie,
passage obligé pour atteindre une efficacité martiale permanente, son
esprit est
mieux structuré, moins encombré par les affects, plus sain et plus
efficace en situation stressante que celui des sportifs axés
sur le physique et, a fortiori, que celui de la multitude engourdie.
Dans le choix
d’une activité sportive complète, utile et bienfaisante, le budo coche
toutes les cases. La citation de Juvénal, poète satirique de l'empire
romain, « Mens sana in corpore
sano », y prend tout son sens.
SORTIR DE L'ILLUSION
L’importance
d’une activité sportive saine et bien menée pour préserver sa santé est
donc
incontestable, néanmoins, une large frange de la
population reste insensible à cette évidence, la civilisation de
l’assistanat ayant pour conséquence insidieuse de transférer la
responsabilité individuelle à la collectivité. De fait, trop nombreux
sont
aujourd’hui ceux qui s’en remettent totalement aux institutions
pour assurer leur sécurité dans quasiment tous les domaines. La
santé, qui peut facilement s’entretenir grâce à une bonne
hygiène de vie dont fait partie le sport, incombe, dans l’esprit
du public léthargique, au corps médical. Ces gens attendent de celui-ci
qu’il
réponde à tous les maux que, par négligence, ils se causent, à
eux-mêmes, mais aussi à
autrui. Il est en effet facile d’extrapoler des travaux anglais
précités qu’avec une population un peu plus active les
hospitalisations, les cas sévères et les morts du Covid-19
auraient été singulièrement moins nombreux, soulageant ainsi l'ensemble
du corps médical et, en conséquence, toute la société civile. Les
bénéfices de l'activité physique ne s'arrêtent
toutefois pas, nous l'avons vu, à une protection contre cette seule
maladie, mais la
manière de se remuer et la volonté de progresser sont prépondérantes
pour que les profits s'étendent à tous les aspects de la santé, au
bien-être, à la qualité de vie et à la joie de vivre. Mais ne vous
méprenez pas ; par ce dernier terme, nous évoquons un état
permanent,
pas le
plaisir éphémère de la fête ou de l'événement qui réjouit. S'ensuit la
nécessité de s'exercer régulièrement avec une dépense énergétique
suffisante pour obtenir des effets sensibles et durables. Encore
faut-il être capable d'évaluer ses efforts pour juger de leur
pertinence.
Toutes
les études sur les pratiques sportives de masse sont indigentes sur
la notion d’intensité ou d’énergie consommée, pourtant
essentielles. Afin
d'éclairer les inactifs et ceux, nombreux, qui vivent dans
l’illusion, croient être sportifs, et même les vrais athlètes qui
aiment comparer leurs performances, voici quelques éléments de
réflexion.
L’intensité
d’une activité physique est le plus souvent exprimée en multiples
d’une unité de base, le MET (Metabolic Equivalent of Task),
correspondant au niveau de dépense énergétique au repos, assis sur
une chaise.
- Activités
de faible intensité (moins de 3 MET) : pas d’essoufflement,
pas de
transpiration. Exemples : marcher à 4 km/h ;
promener son chien ; conduire sa voiture ; yoga ;
stretching ; tir à l'arc...
- Activités
d’intensité modérée (de 3 à 6 MET) : essoufflement modéré,
conversation possible, transpiration légère, 55 à 70% de la
FC max. Exemples : marche à 6 km/h ; jogging à
10 km/h ; ski alpin de loisir, vélo à 25 km/h...
- Activités
d’intensité élevée (de 6 à 9 MET) : essoufflement marqué,
conversation difficile, transpiration abondante, 70 à 90% de la
FC max. Exemples : marche à plus de 8 km/h ou en
pente raide ; course de fond à plus de 13 km/h ;
plus de 30 km/h
de moyenne en randonnée difficile à vélo de route ;
montée rapide des
escaliers sur de nombreux étages ; ski de randonnée
à plus de 600 m/h de dénivelé positif ; escalade
sportive très difficile ; entraînement soutenu d'art martial...
- Activités
d’intensité très élevée (plus de 9 MET) : essoufflement très
important, conversation impossible, transpiration très abondante.
Exemples : sprint à pied ou à vélo ; moins d'une heure au
kilomètre vertical ;
nages
rapides (crawl, papillon) ; tout entraînement prolongé, exigeant,
extrêmement dynamique et sans pause...
Pas
de vérité absolue dans ce classement, mais un moyen de situer
approximativement sa pratique. Évidemment, l’intensité ressentie,
qui ne correspond pas forcément à la véritable dépense énergétique,
notamment en fonction de l’âge ou du niveau d'entraînement, est propre
à chacun et peut
s’éloigner sensiblement des indications ci-dessus. Certains ont
l'impression de sprinter quand ils sont à la vitesse moyenne des bons
coureurs de
100 km. Il faut
toutefois s’efforcer de pousser régulièrement la machine humaine
dans ses derniers retranchements si on ne veut pas qu’elle
s’encrasse. Des activités d’intensité modérée sont
intéressantes surtout si elles durent suffisamment longtemps pour
développer l'endurance, il ne faut pas s’en priver, mais elles sont
insuffisantes pour couvrir tous les besoins d’un individu qui
souhaite être performant, équilibré et sain.
Idéalement, le sportif
transpire, s'essouffle et accélère notablement son rythme cardiaque
tous les jours. De plus, solliciter toutes les filières
énergétiques (aérobie [endurance], anaérobie lactique [résistance] et
anaérobie alactique [effort intense
et
bref]) très
régulièrement s’avère indispensable s'il souhaite bénéficier de la
totalité des bienfaits du sport. À cette fin, il doit s’adonner
à des activités riches,
complètes et difficiles dont les efforts requis sont très diversifiés.
Un sport unique, peu équilibré, à caractère répétitif et
intensité constante, c’est mieux que rien, mais loin d'être la
meilleure option ;
c’est pourtant le mode d’exercice de très nombreux joggeurs,
randonneurs ou
cyclistes qui
rajoutent souvent à ce problème la faible vitesse
de leur prestation ou une pratique très épisodique.
Il
n’est pas nécessaire, cependant, de se livrer à des sports extrêmes
(wingsuit, triathlon, ultra-trail, ski de pente raide exposée…) qui
peuvent glorifier quelques
personnalités aux capacités exceptionnelles, mais causent de terribles
dégâts dans les rangs des
sans-grade. À aborder avec précaution et bien préparé. De même, toute
pratique
compulsive, qui empiète exagérément sur l’engagement professionnel, la
vie
familiale, les relations amicales ou le temps de repos, doit être
sérieusement réfrénée. À moins d’être doté de qualités exceptionnelles
qui offrent des perspectives de réussite sportive hors du commun avec
le rêve de notoriété qui s'ensuit, il
faut savoir raison garder.
Par ailleurs, certains sports s'envisagent difficilement sur la
totalité d'une vie, or les bénéfices de l'activité disparaissent
rapidement en cas de cessation. Dans cette éventualité, on sera, soit
un sportif complet et accompli qui pourra poursuivre sa pratique avec
d'éventuels aménagements ou aisément se recycler,
soit un monomaniaque avec des qualités physiques très ciblées, mais
inadaptées à son inéluctable vieillissement, qui aura
beaucoup de mal à se reconvertir. Certes, le plaisir ressenti, au
moment
de l'action ou lors de la réussite à une épreuve cotée, est important,
mais c'est un peu court pour pérenniser
l'engouement. Il paraît souhaitable de choisir ses
activités sportives et leur mode de pratique en considérant leurs
potentielles évolutions et ce
qu'elles sont susceptibles d'amener dans le futur.
La
santé est la première motivation évoquée par les adultes
prétendument sportifs, or la plupart négligent l’essentiel de ce
qui pourrait réellement leur être bénéfique, car trop souvent portés
par les injonctions médiatiques, la mode et les nouveautés, la
recherche du plaisir instantané
sans projection sur l'avenir, une présence à l'entraînement plus
conversationnelle que sportive ou le besoin de prouver quelque chose
même
si cela s'effectue au détriment de leur équilibre physique ou mental.
Évidemment, parvenir à faire de ses activités sportives la certitude
d’un serein épanouissement et d’une santé quasiment inaltérable
demande des efforts physiques soutenus et réguliers, et quelques
réflexions bien menées, mais il s’agit de soi, de vous… et vous le
méritez bien !
Malgré les différentes actions engagées
et l’ensemble des bonnes volontés mobilisées, l’activité physique reste
globalement à un niveau insuffisant en France. Quels leviers
faudrait-il donc actionner
pour accroître le nombre de vrais sportifs qui pratiquent une ou
plusieurs activités régulières,
suffisamment intenses et respectueuse de l'intégrité physique et
mentale de leurs adeptes ?
COMMENT MOTIVER
LES DIFFÉRENTS PUBLICS ?
La
première étude présentée dans ce texte et l'avis de l'Anses sur
l'indolence des Français ne tiennent pas compte des
enfants de moins de quinze ans pour la première et 18 ans pour la
seconde. De plus, le Covid-19 épargne
largement la jeunesse. Faut-il donc s’en tenir à un statu quo pour sa
pratique
sportive ? Ne tournons pas autour du pot ; la situation en
France n'est pas satisfaisante. Dans beaucoup d’autres pays également,
mais
selon des causes et des modalités largement diversifiées. Le Sars-Cov2
affecte peu les jeunes, c’est un fait, mais beaucoup d’autres maladies
auraient une moindre incidence sur eux si leur état physique et
sanitaire
s’améliorait. Tous les enfants aiment jouer, courir, participer à
toutes sortes d'activités ; comment se fait-il qu'une partie
d'entre eux
deviennent amorphes ? L'explication n'est sans doute pas univoque,
mais
depuis quelques décennies l’hygiène de vie s’est
copieusement dégradée : alimentation trop riche et déséquilibrée,
écrans qui captivent, privent de sommeil et d’exercice... Beaucoup
d'enfants ont un réel besoin de réactiver leur goût du mouvement pour
les
aider à retrouver une bonne condition physique. Certes, l’état et les
collectivités locales agissent dans ce sens ; néanmoins, nous
sommes bien obligés d’annoter leur action ainsi : « peut
mieux faire ! »
L’Éducation Physique et Sportive (EPS)
est obligatoire à l’école, mais,
dans le primaire, le temps qui lui est imparti est largement
insuffisant, les installations sportives parfois éloignées ou
inadaptées, les instituteurs pas formés pour cette tâche et pas
toujours secondés ; bref, les trois heures officielles par semaine
sont
souvent mal utilisées, voire plus ou moins sacrifiées.
Au collège, les élèves doivent suivre chaque semaine quatre heures
d’EPS en sixième, puis trois dans les classes supérieures, mais au
lycée on tombe à seulement deux heures. De plus,
les déplacements, les changements de tenue, l’exposé des consignes et
les multiples aléas inévitables en amputent une bonne partie. Pour
couronner ce mépris du sport,
on assiste à un affrontement entre les tenants de la culture physique
fondamentale et les partisans d’une activité sportive qui préparerait à
la migration vers les associations sportives. Les élèves pâtissent de
cette divergence de conception, la qualité et le suivi de
l’enseignement fluctuant d’une année à l’autre et d’un professeur au
suivant. Beaucoup de freins donc à l'émergence ou à l'entretien d'une
motivation sportive ; comment s'étonner de la kyrielle d'enfants
et
d’adolescents qui présentent des certificats médicaux de
complaisance les dispensant de fournir des efforts pourtant
profitables ?
Officieusement, avant les réformes
Blanquer, mathématiques, français
et EPS revêtaient une importance
presque similaire dans le primaire et le secondaire (c'est ce qui
ressortait du discours des pédagogues qui concoctent la stratégie et
les
programmes scolaires, mais pas des coefficients affectés à chaque
matière). En pratique, pour l'EPS, il
s’agit d’un vœu pieux. Certes, des relais sont prévus pour étoffer le
maigre temps d’activité sportive obligatoire proposé par les
écoles :
EPS et sport au sein des associations sportives scolaires (USEP, UNSS,
UGSEL) et quelques timides passerelles vers les clubs sportifs, mais
seuls les volontaires sont concernés, ce qui laisse une forte
proportion de jeunes dont l’activité physique est faible.
Un enfant inactif a peu de chances de devenir sportif à l’adolescence,
tranche d’âge qui voit ses effectifs diminuer drastiquement dans toutes
les fédérations et les pratiques libres. Qui plus est, s’il est atteint
de surpoids (16%
des garçons et 18% des filles, chiffres en
constante augmentation), voire d'obésité, son avenir médical s’avère
inquiétant, notamment s'il passe par l'enseignement supérieur qui
s'affranchit de toute obligation sportive, traduction imbécile de la
prétendue supériorité des facultés de l'esprit sur les servitudes du
corps, où rien ne
l'aidera à surmonter son handicap. Alors, que faire ?
Deux
types d’incitations peuvent porter des fruits. D’une part celles
provenant des institutions nationales, régionales ou locales, publiques
ou privées, qui peuvent recourir à
différentes formules, d’autre part l’influence de
l’entourage proche.
L’obligation de présenter un certificat médical de non
contre-indication à la pratique d’un sport pour s’inscrire en club
vient d’être officiellement supprimée pour les mineurs et reste
exigible tous les trois ans pour les adultes, sauf pour les sports dits
à
risques. Elle est remplacée par un simple questionnaire déclaratif.
Bien que critiquée par une partie du corps médical, cette mesure vise
à faciliter l’accès au sport
associatif, la visite chez le médecin constituant souvent un écueil qui
compromet les velléités d’adhésion. Voilà le type de mesure apte à
favoriser l’inscription dans un club, mais il s’agit d’un saupoudrage,
car le chantier est immense. D’autres propositions figurent dans le
rapport demandé par Édouard Philippe, mais elles frisent la banalité et
peu se sont concrétisées à ce jour. Toutefois, le Pass'Sport, enveloppe
de 50 €
pour financer une inscription en club attribuée aux jeunes de 6 à
18 ans bénéficiaires de l'allocation de rentrée scolaire, entrera
en vigueur dès septembre 2021. Le geste est louable ; attendons
d'en
voir les effets, mais il serait étonnant qu'il débouche sur une
vraie culture sportive généralisée qui propulserait l’essentiel de la
jeunesse dans les stades, les gymnases, les dojos, les piscines ou la
nature. L’état, les collectivités locales et divers acteurs influents
disposent des moyens nécessaires à cet objectif ; en
auront-ils la volonté ? Les espoirs dans ce sens ont souvent été
douchés, néanmoins des initiatives fleurissent sporadiquement ici
ou là, généralement en direction des enfants et souvent financières.
C'est bien, mais toujours
insuffisant. D'ailleurs l’argent n’est pas le seul levier sur lequel
agir ; ainsi est-on en droit de se demander pourquoi les adultes
sont systématiquement laissés en dehors
des dispositifs incitatifs ?
Les jeunes ont besoin de modèles. Idéalement, c'est la parentèle qui
devrait jouer ce rôle, mais comme l'idéal ne se réalise pas souvent,
car peu favorisé par les pouvoirs publics ou le milieu professionnel,
la société leur offre des
champions médiatiques ou des célébrités locales dont les performances
paraissent inatteignables
pour la grande majorité. Ceux qui ont déjà une propension à l’activité
physique peuvent y trouver une motivation passagère, mais elle doit
rapidement laisser la place au plaisir ressenti en s’entraînant, sinon
l'abandon surviendra immanquablement, sauf pour une toute petite élite
qui se rêve en champion super star et accepte la souffrance qui va de
pair. Les enfants et adolescents alanguis
n’y voient rien de bien excitant en
dehors du décorum qui agite les supporters et autres amateurs de sport
spectacle. Pour ceux-ci, l’influence d’une personne
qu’ils apprécient, qui veut bien leur consacrer un peu de temps et
représente un modèle accessible, sera déterminante. Malheureusement, de
nombreuses familles ont surtout des gens apathiques à fournir comme
image. Chez celles-ci, deux attitudes se détachent :
- Si l’enfant
est indolent, c’est normal, c’est de famille ; il n’y a donc rien
à y faire.
- On souhaite qu’il pratique un
sport — pour sa santé,
pour canaliser son hyperactivité, pour le réveiller, pour réaliser par
procuration le rêve de papa
ou de maman ou pour s'octroyer un peu de temps libre, le club étant
perçu comme une garderie, voire pour une
autre raison
fantaisiste. Un credo dans ces familles : « Fais ce que je te
dis, pas ce que je
fais ! » Parfois, la sauce prendra, sinon un bon copain
sportif pourra peut-être pallier la déficience des
parents, mais il faut beaucoup de chance pour que ces scénarios se
réalisent.
Dans les deux cas, l’influence des
adultes inactifs est néfaste. Ce
sont eux qui devraient être incités à l’effort sportif — et
pourquoi
pas obligés, mais certains vont crier à la dictature —, même à
tout
petit niveau. Un tel modèle, facile à imiter et même à dépasser, serait
un excellent stimulant pour des enfants spontanément peu portés sur
l’effort physique et cette démarche profiterait à tous, pas seulement
sur l'aspect physique.
Tous les sports ne conviennent pas aux
enfants ou aux adolescents. D’ailleurs, certaines disciplines ne leur
sont pas, ou peu, ouvertes : haltérophilie, alpinisme en
autonomie, sports
extrêmes...
Le véritable art martial s’inscrit dans cette
liste, mais des déclinaisons éducatives, ludiques ou purement sportives
les
préparent efficacement à évoluer vers un authentique budo à l’âge
adulte.
Jusqu’à environ 10 ou 12 ans, la découverte d’une large
panoplie de
sports, en partie le rôle théorique de l’école, l’autre partie
consistant, toujours théoriquement, à leur conférer les aptitudes
physiques nécessaires pour y prendre plaisir, permet un choix objectif
par la suite. À
l’adolescence, le picorage doit s’arrêter pour laisser la place à
l’approfondissement d’une ou deux disciplines. Les
inciter à choisir un sport complet ou deux moins équilibrés, mais qui
s’harmonisent bien, serait
souhaitable, mais à cet âge, les déséquilibres ne sont pas graves. La
remédiation interviendra, espérons-le, une fois adulte. Dans tous les
cas, il est préférable de laisser le jeune choisir une activité
physique qui ne séduit pas les parents, plutôt que de lui imposer un
sport auquel il ne prendra pas de plaisir. Aller au sport ne doit
jamais être une corvée, néanmoins, ses effets étant largement
profitables, il faut qu'il s’y adonne sérieusement, ce qui n’adviendra
pas
sans une certaine forme d’euphorie. S’il veut changer d’activité, ce
n’est pas un problème dans la mesure où son prochain choix lui
apportera peut-être ce qu’il n’a pas encore trouvé, sauf si cela se
répète. Dans ce cas, il faudra lui faire exprimer les sensations qu’il
recherche afin de l’aiguiller vers le sport, le club ou l'entraîneur
qui le combleront.
Beaucoup de clubs, obnubilés par la
compétition, de très loin les plus
nombreux quel que soit le sport, séduisent la majorité des parents, qui
rêvent de voir leur progéniture
monter sur un podium, or nombre
d’enfants sont rebutés par l’état d’esprit qui y règne ou s'y adaptent
péniblement,
leur entourage leur faisant croire à cette seule possibilité.
Pourtant,
des associations, certes clairsemées, proposent des activités sportives
similaires, mais axées sur le plaisir, la
détente, le développement des qualités physiques, le plein air, plus
ludiques ou éducatives qui leur
conviendraient mieux. Néanmoins, peu de gens acceptent de
se
soustraire à la pensée dominante qui veut que chacun soit classé,
comparé, noté, hiérarchisé. Si l'école tente timidement (et stupidement
en remplaçant les chiffres par des lettres, ce qui ne trompe personne)
d'échapper à ce
diktat, le sport y est totalement empêtré. La compétition est devenue
la plaie de notre époque, peu ou prou cautionnée par la population
presque entière. Quand la France accède à la finale de la coupe du
monde de football ou de la coupe Davis, peu de gens s'en
désintéressent,
attitude qui traduit la soif narcissique collective de la domination.
Cependant, il suffit d'assister à des tournois de karaté ou de
judo opposant des poussins (6 à 7 ans) encouragés par des parents
hystériques alors
que ces chérubins ne comprennent rien aux décisions arbitrales pour
saisir toute l'absurdité de l'esprit compétitif généralisé. Le sport
peut avoir des finalités très diverses ; laissons chacun choisir
librement sa façon de pratiquer, n'imposons pas de vue partisane et
nous auront sans doute plus de
pratiquants. Pouvoirs publics, dirigeants sportifs, fédérations qui
associent leur appellation « sportive » à l’obligation de
compétition, parents et toute la
société civile ont des efforts à faire pour parvenir à ce résultat.
Dans l'état actuel du sport et des mentalités, la discipline n’est pas
le seul choix à
opérer ; les conditions dans lesquelles elle s’exerce et les
qualités pédagogiques de l'entraîneur sont
primordiales pour que chacun y prenne plaisir. Malheureusement, si les
grandes villes offrent quelque peu le choix de la forme sportive, les
provinces obligent à aller au plus proche de chez soi, mais rien
n’empêche les adhérents ou leurs parents hostiles à l'obligation de se
mesurer de faire pression sur les dirigeants pour infléchir leur vision
absolutiste du sport où la compétition est la seule voie conforme à sa
définition académique. Méfions-nous des généralisations abusives.
« Les jeunes ont besoin de se mesurer, de s’affronter »
entend-t-on couramment. C’est vrai pour une partie d’entre eux ;
pas pour tous, loin de là.
D'autre part, le sport aide l’esprit à
s’ordonner et différentes études démontrent un
taux de réussite aux examens supérieur lorsque les étudiants sont
sportifs. Ceux qui croient privilégier l’intellect en économisant leur
énergie se trompent. Une multitude d’expériences en attestent :
- L’exercice physique favorise
l’ancrage des apprentissages ;
- Il augmente la performance lors
des tests d’intelligence.
Parents, remuez-vous donc et mettez tout
en œuvre, notamment en montrant
l'exemple et en vous affranchissant de tout dogmatisme, pour dynamiser
votre
entourage ; il en va de votre santé, physique et mentale, de celle
de vos proches, surtout
celle de vos enfants, de leur réussite dans la vie et surtout de leur
épanouissement.
Examinons maintenant la situation des
individus matures.
Si certains adultes, quel que soit leur âge, ont compris l'importance
du sport et y prennent plaisir, la grande majorité, dont on a vu
globalement
l’indigence de leurs efforts physiques, se complaît dans uns sorte de
léthargie confortable mais préjudiciable, certes à des degrés divers.
Pour les faire réagir, il faudrait que les
communications institutionnelle et interpersonnelle soit un peu plus
persuasives grâce à des arguments bien étayés et des stimulations bien
pensées ; nous y reviendrons. Mais d'abord, le phénomène
d’entraînement
collectif doit
être
considéré ; plus nombreux sont ceux qui se livrent à une activité,
adoptent un comportement
ou se rallient à une opinion, plus il y a de personnes tentées de les
rejoindre. C’est forcément vrai pour le sport, surtout si des proches
fournissent le déclic qui manque à l'élan initial, si les institutions
en manifestent la volonté et si les médias cessent d'encenser la seule
élite sportive. Toute méthode favorisant ou valorisant l'activité
physique des masses populaires est bienvenue.
Plus de la moitié des sportifs n’adhèrent pas à un club ou à une
association. Cela pourrait être anecdotique, l’essentiel étant de
pratiquer, mais nombreux sont ceux qui font des erreurs dans la
conduite de leurs entraînements ou ne trouvent pas la stimulation
nécessaire au dépassement d’une routine peu profitable. Être guidé par
un professionnel ou une personne compétente, profiter de l’ambiance
dynamisante d’un groupe, même pour des activités qui semblent simples
comme la marche, le jogging ou le vélo, s’avère souhaitable, au moins
au début, pour éviter les bévues ou le manque d’entrain qui conduisent
à une pratique relâchée sans bénéfice, voire à l’abandon. Refuser
l’inscription dans un club ou les
services d'un professionnel pour
économiser quelques centaines d’euros, pour rester libre de ses
décisions ou pour un quelconque motif n’est pas un bon calcul. Mieux
vaut s’assurer de démarrer sur de bonnes bases, mais une fois les
compétences fondamentales acquises, chacun peut s'autonomiser s'il le
souhaite.
Malheureusement, si certains essayent de sortir de leur torpeur,
parfois maladroitement, il existe des hordes d’adultes valides, parfois
encore jeunes, qui s’encroûtent, n’ont plus la capacité, ou l’envie, de
fournir quelque effort sauf pour hurler devant leur télé quand un but,
un point ou un essai a été marqué. Certes, les contraintes
professionnelles et familiales deviennent parfois envahissantes, mais
elles servent surtout de prétexte. L’hygiène de vie, dont le sport et
l'alimentation constituent le cœur, ne devrait
souffrir d’aucun relâchement. Certains, anciens sportifs, se
reprendront un jour, mais pour tous les autres, je ne vois pas d’autre
remède qu’un sérieux coup de pied au cul. Reste à savoir qui — ou
quel événement — leur administrera, quand et selon quelles
modalités. Peut-être faudrait-il leur répéter, preuves à l’appui, que
les morts du Covid-19 sont ceux qui, comme eux, refusaient l’effort
physique, mais ce sera sans doute insuffisant puisqu'ils sont sortis de
l'épreuve vivants, ce qui les conforte dans leur absurdes croyances.
Qu’en est-il avec les aînés et les
vieillards de plus en plus
nombreux ?
Les personnes âgées autonomes ne doivent pas être différenciées des
adultes plus jeunes ; elles peuvent être encouragées de la même
manière. Les jeunes retraités disposent d'ailleurs de plus de liberté
pour se consacrer au sport, mais, en ce domaine, le temps perdu ne se
rattrape pas. Mieux vaut donc commencer jeune et ne jamais
s'arrêter ;
les résolutions tardives ont peu de chances d'aboutir.
Certes, l’énergie déployée n’est pas la
même à vingt, quarante, soixante ou quatre-vingts ans,
mais quel plaisir d’affronter ses enfants sur un tatami, d’emmener ses
petits-enfants en haute montagne ou ses arrière-petits-enfants faire
une
randonnée à vélo ! Ou n'importe quelle personne avec qui on se
sent bien et à condition d'avoir cultivé de longue date les capacités
sportives nécessaires.
Le plaisir partagé a peut-être plus
d'importance que les bénéfices personnels, mais ce sont ces derniers
qui permettent cette communion.
Restent les personnes en résidence collective, médicalisée ou non, et
celles, dépendantes, aidées à domicile ou placées en institution
spécialisée, qui n'en seraient peut-être pas là si elles avaient été
plus actives au préalable. Être âgé, en maison de retraite n’exclut pas
un état de santé à peu près correct et un minimum de goût à l’effort,
aussi aimerait-on voir
dans ces lieux un peu plus d’animations sportives (pas devant la télé),
évidemment adaptées aux particularités de chacun. Les résidents
verraient leur santé, leur dynamisme et leur joie de vivre faire un
sérieux bon en avant. Quant aux personnes ayant besoin d’une
assistance, elles ne sont pas toutes impotentes, loin s’en faut, et des
séances de gymnastique bien pensées pourraient leur redonner un peu
d’autonomie. Actuellement, très peu d'institutions ont mis en place une
offre d'activité physique adaptée, mais cela fait partie des
propositions du rapport parlementaire de 2018 et ce devrait être un
critère de choix quand on souhaite y envoyer un membre de sa famille.
L'âge, nous l'avons déjà
souligné, n'est
pas un bon critère pour expliquer la mortalité, due au Covid-19 ou à
une autre maladie.
Nombreuses sont les personnes âgées actives et sportives ; au-delà
du
fait qu'il est normal de mourir un jour, ce ne sont pas ces vieillards
dynamiques qui ont alimenté les statistiques morbides qu'on nous a
infligé tous les jours depuis le début de l'année 2020, mais ceux
auxquels on a refusé — ou qui
ont eux-mêmes rejeté — un programme
d'activités physiques qui leur aurait évité de sombrer dans un état
quasi végétatif. Espérons que cette hécatombe permettra aux
responsables de toutes les institutions concernées de prendre
conscience d'une réalité incontournable : les personnes âgées
seraient
moins vulnérables aux calamités qui les affectent fréquemment si elles
étaient plus dynamiques, de préférence dans des activités où les
interactions sont nombreuses afin de rompre leur isolement. À bon
entendeur…
Offrir une activité physique à tous ces
vieillards qui dépérissent est
une nécessité à instaurer au plus vite, mais la solution à plus long
terme
réside dans l’établissement d’une excellente hygiène de vie dès
la plus tendre enfance sans abandonner les plus apathiques à leur sort.
Devenus des adultes
sains, actifs et heureux, la
transition vers la vieillesse s’établirait sans heurt ni grand
chambardement, les bonnes habitudes prises précédemment assurant la
continuité d’une vie épanouie et sans gros souci de santé. État,
institutions,
entreprises et citoyens ont chacun leur rôle à jouer.
Ce programme repose sur des
initiatives individuelles, des aménagements d’horaire et de locaux en
entreprise ou dans les services administratifs pour s’entraîner avant
ou après le travail ou lors des pauses (salles de musculation, de
squash, de
tennis de table…), des réorganisations au sein des
établissements, une revalorisation de l'éducation physique dans
l'enseignement et des moyens, notamment financiers, octroyés par les
sociétés privées et les
pouvoirs publics. Eh oui ! le nerf de la guerre est toujours
l’argent, même s'il ne suffit pas, loin de là, cependant, le retour sur
investissement est parfois
spectaculaire. Combien la France aurait-elle finalement économisé avec
des Français en meilleure santé face au Sars-Cov2 ? Quel profit
pour
les entreprises ou les services de l'État si les employés étaient en
meilleure santé et les
arrêts de travail moins fréquents ? Toutefois, les
avantages procurés à la
collectivité par une population dynamique, sportive et bien portante ne
s'arrêteraient certainement pas à l'aspect financier. Je laisse chacun
imaginer
ce que pourrait être la vie quotidienne et les relations au sein d’une
telle société. Juste un détail
pour vous aiguiller vers un des apports majeurs d'une généralisation du
sport, de préférence non compétitif, dans la population : les
hormones libérées pendant l’effort
diminuent l’agressivité et induisent la bonne humeur. Et ce n’est qu’un
aspect des bénéfices
collectifs — la santé sociale — à escompter. Utopie ! À
chacun d’agir pour que ce n’en soit pas une.
DE
LA RESPONSABILITÉ INDIVIDUELLE DANS LES MALHEURS COLLECTIFS
Les
décisions des autorités pour tenter de juguler cette pandémie de
Covid-19 nous ont infligé d’abominables contraintes loin d'être
terminées dont les conséquences seront lourdes, mais difficiles à
évaluer pour l'instant.
D’autres épidémies surviendront et il est probable que nous devions
encore subir le joug de la gent médicale si
la population ne réagit pas. On l’a vu, ceux qui
encombrent
les hôpitaux et décèdent le plus, toutes pathologies confondues, sont
les inactifs. En 2018, 40% des Français déclaraient être atteints
d'une maladie ou d'un problème de santé chronique ou durable, souvent
induit par l'inactivité et prétexte à ne rien faire. Que de proies pour
le Sars-Cov2 et les myriades d'agents pathogènes embusqués !
Imaginons
que l’ensemble de la population augmente et améliore son activité
sportive. C’était l’objectif du rapport demandé par Édouard
Philippe : rendre sportifs trois millions d’inactifs. Pourquoi
pas, puisque si 66% des Français déclarent
pratiquer, dans certains pays on arrive à plus de 80%, certes
avec l'imprécision due à la méthode déclarative. Ainsi,
malgré une détérioration des modes de vie depuis quelques années
(sédentarité, malbouffe... — l’occidentalisation n’a pas que des
avantages —), la Chine cultive une tradition sportive, ou plutôt
d'activités physiques, souvent en plein air, qui la place
parmi les nations les plus dynamiques. Nous évoquons la pratique
populaire, pas celle des élites. Des millions de
personnes de tous âges s'activent chaque jour dans les parcs et les
jardins
(marche, jogging, qi-gong, tai-chi, wu-shu, gymnastique, acrobatie,
danse...) ; les
séances de culture physique sont courantes en entreprise avant de
commencer une journée de travail ou durant les pauses ; les
écoliers se préparent à l'étude
en suivant en musique des chorégraphies sportives ; les clubs
d'arts martiaux drainent un
immense public ; les sports traditionnels régionaux attirent
toujours de nouveaux adeptes et les sports
occidentaux ont le vent en poupe. Ajoutons deux cents millions de
petites exploitations agricoles dont la majorité est encore exploitée
manuellement donc de façon très physique. D'ailleurs, la mécanisation
dans quasiment tous les domaines
est moins avancée en Chine que dans les pays occidentaux, ce qui
implique un travail musculaire nettement plus soutenu. Bien sûr, la
stratégie zéro
Covid a enrayé l'expansion du virus, bien qu'il ressurgisse
sporadiquement ici ou là, mais cette sportivité, ces
activités plus exigeantes que le sport d'une majorité d'Occidentaux ne
pourraient-elles pas expliquer, au moins en partie, le peu de victimes
de la pandémie dans ce pays ?
En tout cas, une belle marge de progression nous est offerte, car ni le
manque de temps, ni l’âge, ni la maladie, qui tiennent une grande
partie de notre population à l’écart des APS, ne s’y opposent vraiment.
Ce ne sont que des prétextes, et il suffirait de développer les moyens
et les incitations adéquats pour les voir fondre comme glace au soleil.
De belles installations sportives par exemple, avec des équipements
modernes, bien entretenues et régulièrement rénovées, attirent un plus
large public. Cependant, dans de nombreuses communes, cela tient plus
du rêve que de la réalité, le sous-équipement et la vétusté étant
omniprésents. D’autre part, de nombreuses installations sont
sous-exploitées, réservées à certains publics ou associations qui ne
les utilisent pas à plein temps. L’exemple des murs d’escalade, des
gymnases ou des terrains de sport gérés par les collectivités locales
ou confiés à des exploitants
associatifs ou privés, souvent au sein d'établissements
scolaires ou municipaux, est
frappant qui n’accueillent aucun sportif durant une grande partie de
la journée. Certaines structures territoriales ont développé diverses
formules pour mieux utiliser ces installations, notamment en rendant
libre leur accès à certaines
heures moyennant un paiement à la séance ou par abonnement, mais
elles sont rares.
Multiplier les pistes cyclables est
également un bon moyen pour favoriser l’utilisation du vélo à des fins
utilitaires ou sportives. Avec un peu d’imagination, il est possible
d’inciter les gens lymphatiques à devenir un peu plus actifs et
pourquoi pas sportifs.
Bien sûr, drainer plus de monde améliore modestement la
situation sanitaire générale ; c'est un premier pas, mais il
faudrait que les
conditions de pratique soient elles aussi en net progrès et que ceux
qui s'illusionnent deviennent réellement dynamiques. Quelques
incitations bien ciblées devraient aider les inactifs à démarrer dans
de bonnes conditions et les sportifs engourdis à amplifier leur dépense
d’énergie. On pourrait suggérer, entre autres, des animations
télévisuelles diffusées régulièrement à des heures adaptées dans
le genre de Gym Tonic, émission animée par Véronique et Davina dans les
années 80 qui permit à de nombreuses femmes d’accéder à une activité
sportive. Imposer des séances de gymnastique et d'étirements aux
employés de bureau limiterait les dégâts occasionnés par la sédentarité
et la position assise prolongée. Sans doute, d'autres initiatives
pourraient avoir un rôle
moteur, à condition de ne pas recourir aux seuls intellectuels dont les
propositions sont souvent déconnectées de la réalité et de
laisser le sportif lambda et le non-sportif s'exprimer ; il
s’ensuivrait une meilleure santé de la population, donc une
résistance à la propagation épidémique largement renforcée.
Ainsi, nos services hospitaliers feraient face sans grande difficulté
à l’arrivée des personnes gravement atteintes par un nouveau
microbe et il n’y aurait nul besoin de restreindre les libertés,
dont la finalité avouée a toujours été de ne pas engorger les
hôpitaux, ni de placer l'économie sous perfusion, ce qui a
inévitablement des conséquences. Qui plus est, cela pourrait aider la
kyrielle de
professeurs de médecine, qui ont orchestré une inaudible cacophonie
durant
cette épidémie, à mettre une sourdine à leurs déclarations
intempestives et souvent contradictoires.
Une
forte proportion de la population française a dénigré, ignoré ou
contourné les prescriptions officielles destinées à lutter contre
le Covid-19. Chacun est libre d’affirmer ses idées, parfois plus
sensées que les déclarations d'experts à la vision étriquée, et
d'assumer une
sanction s'il contrevient à la loi, mais parmi les
contradicteurs, nombreux sont les individus à la santé chancelante
à cause d’une hygiène de vie déplorable. Puisque, en dépit de leur
hébétude, il était
en leur pouvoir d’améliorer leur condition physique, ils sont donc
coresponsables
de la situation et des décisions qu’ils contestent. Il n’est
peut-être pas trop tard pour que leur balourdise se transforme en prise
de conscience : la santé n’est pas une loterie ; elle
s’entretient et les absurdes vœux de bonne santé du nouvel an n’y
peuvent rien. Éviter les excès, s’alimenter correctement,
nettoyer et aérer les locaux… et bien sûr mener une vie active et
sportive ; la recette est simple et facilement mise en œuvre
par les personnes de bon sens. Évidemment, le bon sens n’est pas aussi
bien réparti que Descartes le prétend dans l'introduction de son
Discours de la méthode ; c’est pourquoi des
incitations doivent être trouvées et mises en place. Pourquoi pas
financières, puisque même les abrutis savent compter, mais pas sans
précautions ni contrôles.
Les assurances fonctionnent selon le principe de la mutualisation des
risques. Néanmoins, cette règle n’est pas gravée dans le marbre puisque
ceux qui coûtent cher voient souvent leurs cotisations augmenter et
inversement pour les autres. Voyez les assurances auto
par exemple. Actuellement, quasiment tout le monde cotise à peu près au
même taux et est presque
intégralement remboursé de ses frais médicaux. Or les sportifs
dépensent de l’argent pour s’équiper, s’affilier à un club ou se rendre
sur leur lieu d'entraînement, mais ils sollicitent peu les assurances.
A contrario, les inactifs ne
dépensent rien puisqu’ils ne font rien, mais ils coûtent très cher à la
collectivité alors qu’ils sont largement responsables de leur état de
santé. Ne pourrait-on pas imaginer un dispositif plus judicieux, pas
seulement financier, qui
inciterait à l’activité un tant soit peu sportive sans léser ceux qui
ne sont pour rien dans la dégradation de leur état de santé ?
C'est déjà ce qui est fait avec les multiples communications
dissuasives et l'importante, mais apparemment insuffisante taxation du
tabac et de
l'alcool pour
couvrir les dépenses que leur consommation engendre. Les
nombreux
énarques et polytechniciens qui somnolent dans les ministères
pourraient se pencher sur la question.
Finalement,
un avenir radieux, dénué d’angoisses sanitaires, ne repose pas sur les
seules épaules d’une quelconque autorité fût-elle politique,
bureaucratique,
scientifique ou médicale ; il dépend de
la volonté, éventuellement stimulée, de chacun d’assumer sa
responsabilité. Quand un
maximum de citoyens prennent soin de leur santé de façon préventive,
c’est l’ensemble
de la société qui est soulagé. Ce pourrait d’ailleurs être le
suprême argument pour convaincre les inactifs réfractaires aux
consignes officielles en ces temps de pandémie : faites du
sport, pas pour améliorer votre santé puisque vous vous en fichez,
mais pour laisser le système hospitalier respirer lors de la
prochaine épidémie et ainsi éviter les prescriptions
sanitaires liberticides.
Cependant, ces contestataires ne sont pas les seuls responsables. C'est
l'ensemble des gens inactifs
ou peu portés sur l'activité physique, à la santé précaire, fragile,
voire franchement mauvaise, qui a saturé,
ou peu s'en faut, les services hospitaliers et, par ricochet, nous a
imposé une amputation drastique de nos libertés. Par souci d'équité,
mais surtout pour éviter de reproduire la crise
actuelle, ces personnes valides et autonomes, mais amorphes, qui
ont causé collectivement cette situation ubuesque,
devraient accepter
aujourd'hui l'effort d'améliorer leur condition physique en étant plus
actives et plus sportives.
« Mais nous n’y sommes pour
rien ! » clament en chœur les inactifs qui n’ont pas été
malades durant cette pandémie, n’ont par conséquent pas encombré les
hôpitaux et ne souhaitent toujours pas faire le moindre effort. Certes,
ils ont eu la chance de ne pas subir le Covid-19, mais c'est
oublier la pléthore d'hospitalisés dont le piètre état sanitaire le
plus souvent dû à leur inactivité, en
tout point
comparable au leur, ne leur
permettait pas
de lutter contre ce virus. D'ailleurs, celui-ci n’est pas
encore terrassé et il les infectera peut-être demain. Et même si ce
coronavirus les épargne, un variant, un autre microbe ou une maladie
induite par leur inconséquence leur sera
peut-être fatal. Pour éviter cette éventualité, l’occupation
d’une kyrielle de lits d’hôpitaux et les restrictions de liberté qui en
découlent, il
suffit d’en supprimer collectivement la cause, c’est-à-dire l'état
physique et
sanitaire dégradé d'une part notable de la population, proie rêvée des
agents
pathogènes existants ou à venir. On l'a vu, il suffit de
respecter quatre prescriptions pour s'assurer une bonne santé, donc une
excellente résistance aux maladies :
- Ne pas fumer ;
- Boire peu d'alcool ;
- Manger équilibré avec des fruits et légumes ;
- Pratiquer un sport régulièrement ;
- Nous ajouterons volontiers un
cinquième item : nettoyer et aérer régulièrement les lieux de vie
pour éviter les concentrations de polluants.
Dans certaines études allant dans le
même sens, d'autres critères
sont évoqués, notamment ne pas être affecté d'un surpoids ou
d'hypertension artérielle.
Pour avoir
un sens, l'individu concerné doit respecter ces recommandations de
façon permanente ; dans ce cas, le surpoids ou l'hypertension sont
improbables,
inutile donc
de les inclure dans la liste des bonnes conduites puisqu'ils ne sont
pas des comportements, mais des états, conséquence du non-respect des
cinq
paramètres de l'hygiène de vie.
Avec seulement cinq éléments, la recette est simple et accessible à
tout le monde ;
à chacun de mettre la main à la pâte pour que la collectivité s’en
délecte.
Le prochain virus meurtrier se régalera si la
santé de la population ne s'améliore pas. Cependant, les éternels
assistés comptent sur la science pour les protéger des prochaines
calamités. Mais la science n'a pas réponse à tout ; parfois elle
semble même se
tromper. En fait, il est normal d'émettre des hypothèses que
l'expérience ne confirme pas. Ce n'est pas la science qui s'égare, mais
les vulgarisateurs qui dogmatisent des théories, les chercheurs qui
publient trop vite des résultats partiels ou des sommités à l'ego
hypertrophié qui sidèrent la communauté scientifique par leurs
affirmations sans fondement. Si ces comportements sont nuisibles, la
vraie science est utile, mais il est préférable de ne pas tout en
attendre, car elle n'est pas toute puissante, surtout quand d'autres
solution qu'une naïve passivité
existent, or l'état sanitaire est directement corrélé à cinq
principes faciles à appliquer. Le sport en constitue d'ailleurs la
pierre angulaire qui, outre la santé, fournit de nombreux bienfaits.
Pourquoi s'en priver ?
Pour aider les adeptes de la
vie sans effort et ceux qui ne sont pas suffisamment actifs, il
serait bon que chaque sportif, chaque entraîneur communique son
enthousiasme afin d'aiguillonner leur envie de se remuer. Quant à
l'état, aux collectivités territoriales, aux
organisations, aux institutions et aux médias, espérons qu'ils relayent
les conclusions convergentes des diverses études sur l'activité
physique des masses populaires, mais surtout pérennisent l'information
essentielle
qu'elles mettent en lumière en mobilisant tous les moyens
nécessaires : le sport, c'est la base de l'hygiène de vie ;
le sport, c'est la santé. Il a fallu 50 ans pour équiper tous les
logements français d'une salle d'eau avec douche ou baignoire et faire
en sorte que leurs habitants l'utilisent ; une première victoire
pour
l'hygiène. Combien de temps faudra-t-il pour amener la majorité de la
population à s'exercer dans les installations sportives existantes et
futures ou à pratiquer sérieusement un sport de nature ?
L'actuelle pandémie de
Covid-19 et la perspective de nouveaux fléaux suggèrent qu'il faudrait
aller beaucoup plus vite.
Cependant, communiquer sur le lien entre le sport et la santé est
utile, mais insuffisant pour dynamiser les foules. En fait, manger des
légumes quand on ne rêve que de viande, de charcuterie, de frites ou
de pâtisserie, se
priver du plaisir de fréquentes fêtes alcoolisées ou remuer sa graisse
quand de bons programmes sportifs sont diffusés, tout cela pour,
théoriquement, améliorer sa santé ne constitue pas des
propositions
très attrayantes pour une bonne partie de nos concitoyens. Même les
personnes vertueuses qui ne boivent pas, ne fument pas et s’appliquent
à équilibrer leur alimentation, mais ne se sentent pas concernées par
les activités physiques, réagissent peu à l’incitation sportive pour
améliorer leur santé qu’elles pensent déjà soigner correctement. Si,
pour exhorter à la pratique du sport, on oublie de mentionner le
plaisir
ressenti durant l’entraînement, l'amélioration de l'humeur,
la satisfaction de réussir des gestes
ou des actions difficiles, l’optimisation de la condition physique,
l’acquisition de nouvelles aptitudes qui facilitent la vie quotidienne,
la capacité du sportif à jouir pleinement de tout ce que l’existence et
la nature lui proposent, la sensation de bien-être permanent qui
s’installe progressivement, la disparition de tous
ses soucis pendant les entraînements, le partage de moments intenses,
l’euphorie
communicative des sportifs, la source de nombreuses amitiés, une
meilleure connaissance des réactions humaines, la parfaite perception
de l'origine des faiblesses et des difficultés qui permet de réagir et d'y remédier
instantanément sans aide extérieure… et l'enchantement d'agir
pour le bonheur collectif, peu de gens auront envie
d’adhérer ou de renouveler une première expérience qui s’est parfois
révélée plus souffrance que délivrance si les bonnes conditions
n’étaient pas réunies. Le sport, il faut le claironner, peut combler
toutes ces attentes, tous ces besoins, tous ces désirs et bien d’autres
bienfaits que nous n’avons
pas cités. À condition de fournir quelques efforts et de persévérer, la
récompense est assurée.
Le sport nous détend, le sport nous
épanouit, le sport nous procure un sentiment de
plénitude, le sport nous offre la joie de vivre, le sport nous rend
heureux individuellement et collectivement... accessoirement, le
sport nous confère la santé. Le sport est indispensable.
Convaincu ?
Alors bougez,
accélérez, soyez dynamique, montrez l’exemple, communiquez votre flamme
et activez tous vos
relais influents pour que les pouvoirs publics et tous les acteurs
concernés se décident enfin à agir
sérieusement ; il y a
urgence ! Et j’aurais mauvaise grâce à ne pas vous
conseiller la meilleure activité : un authentique art martial,
apte à procurer tous les avantages que nous venons d'évoquer. À
Okinawa, berceau du karaté, la population est très
active, dynamique, sportive, conséquence d'une histoire hors du commun.
La pratique du budo est une véritable institution, y-compris pour les
personnes âgées, nombreuses dans les dojos. Assurément, avec le régime
alimentaire, voici en grande partie l'explication de l'exceptionnelle
longévité des habitants de cette petite île.
Sakura sensei
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